Un silence de mort plane au-dessus du champ de bataille.
Les survivants respirent difficilement, éreintés par se long combat et les épreuves éprouvantes de ces dernières heures, le cauchemar qu’ils ont dû traverser …
Les cris des mourants et les bruits des combats raisonnent encore dans leurs têtes. Tout le monde est sonné, abattu, Incapable de croire qu’ils sont des survivants …
Puis les regards se portent sur les amas de chair et de corps et ils prennent conscience de la portée du massacre …
Les larmes commencent à couler.
Pépette pousse un hurlement déchirant en découvrant les corps sans vie de Brindille et Etincelle. De grosses larmes coulent sur ses petites joues, elle tape les corps inanimés de ses amies avec ses poings en hurlant : pourquoi ? Pourquoi ?
Un peu plus loin, Grazz quitte le champ de bataille en portant le corps sans vie de Marion.
Onirym a envie de se précipiter vers eux et de la prendre dans ses bras … Mais Marion n’est plus, elle est morte, comme elle aimait vivre : en orc !
Sinara s’approche d’Onirym et vient se blottir contre lui.
Tous les deux sont incapables de bouger, leur regard courant sur les ruines du désastre, sans pouvoir détourner leur regard du charnier … Chaque corps sans vie d’un de leur ami, qu’ils aperçoivent est comme un coup de poignard, ils sont submergés par la tristesse.
La victoire a un goût bien amer.
Un petit air triste s'élève, une voix claire et féminine, envahie par l’émotion et le chagrin. C’est Griselda qui fredonne un air millénaire, une complainte sur l’amour perdu. Elle est agenouillée devant le corps de Percifon, lui tenant la main. Les satyres ne sont pas réputés pour leurs capacités grégaires, mais Percifon a absolument voulu combattre, aux côtés de ses amis. Il était inconcevable pour lui de rester à l'arrière ou bien au chaud derrière les murailles de la cité ... Sa bravoure fut à la hauteur de la situation, mais elle aura eu raison de lui ...
Le seul à garder l'esprit clair, malgré la fatigue, c'est Beornbryn. Il réorganise les troupes restantes et envoie des escouades pour chasser les derniers gobelins en fuite et éradiquer les dernières poches de résistance des démons et des créatures du chaos. C'est surtout l'armée naine qui se charge de cela.
Il envoie également des troupes protéger les portes de la cité et commence à rassembler les corps pour les consumer dans de grands brasiers, avec l'aide des mages de feu.
Mais il se sent seul … Trakaic, Meezog et Meilaern sont morts, comme beaucoup d'autres de ses frères d'armes. Leur manœuvre secrète, pour atteindre rapidement Imzen et ses lieutenants, c'est heurté à une farouche résistance ... Chaque pas qu'ils firent pour progresser dans les lignes ennemis fut payé d'un lourd tribu. Il le sait au fond de lui : les Loups de Sangs ne sont plus. Une page se tourne …
Du haut des murailles de la cité, les couleurs sont levées, on dresse les oriflammes et on entend partout dans la ville le bruit sourd des cors qui annoncent la victoire. Une clameur de joie, de soulagement et d'allégresse envahit la cité d’Onirym. Dans les rues les gens chantent, dansent, soulagés de ne avoir fini dans le ventre d’un troll ou découpés en rondelle par un guerrier du chaos.
Les tambours et les trompettes se mettent à propager la bonne nouvelle, comme un frisson d’espoir qui parcourt le monde.
Bientôt, partout dans les villages, dans les hameaux, dans les tours isolées, on propage la bonne nouvelle. Elle se répand, passe d’un royaume à l’autre, traverse Arendyll dans un flot de joie et d’espoir immense !
L’orage n’est plus.
Le cercle rouge s’est dissipé dans le ciel.
Quelques nuages blancs traversent le ciel bleu azur, inondé de soleil.
Une belle journée d’été s'achève.
Le vent souffle et les feuilles des arbres frémissent de plaisir. Dans le ciel, une lune d'argent éclatante se lève. Des millions d'étoiles brillent comme pour illuminer le monde d'un souffle d'espoir et de renouveau !
Dans le campement des orcs, Marion se redresse en criant !
Grazz : hé bien ma p'tite tu reviens de loin !
Marion : quoi ... que ...
Asham le chaman se penche au dessus d'elle : la mort n'a pas voulu de vous, nous avons guidé votre esprit jusqu'à votre corps ! Cela peut être un peu douloureux ... Prenez le temps de vous remettre !
Une heure plus tard, prévenu par un message de Grazz, Onirym arrive en courant.
Il rentre dans la tente à bout de souffle. En voyant Marion, assise, au milieu des orcs, ses yeux s'écarquillent, il n'arrive pas y croire !
Onirym : Marion ! Tu es vivante !
Marion se tourne vers lui et fait un léger sourire : il semblerait bien en effet ...
Onirym se jette sur elle et l'enlace chaleureusement !
Marion : et bien ...
Grazz : oh ! Petit bonhomme ! Laisse là respirer ! Elle est encore faible !
Onirym : je suis si heureux !
Marion : et là ? Ca vous gène pas, Sir, que je sois torse nu ?
Onirym s'écarte : oh pardon ...
Les orcs éclatent de rire, accompagnés par Marion !
Marion : idiot ! C'est pas drôle de me faire rire ! Ma gorge me fait un mal de chien !
Onirym : au moins, tu n'as pas perdu tes vieux réflexes ...
Onirym traverse un long couloir désert du palais.
Il vient de quitter la grande salle où l'on célèbre la victoire.
Après avoir pleuré les morts et dit au revoir aux défunts, il est temps que la vie reprenne son cours. Alors les survivants ont fêté cela comme il se doit !
Le vin a retrouvé son arôme, la nourriture sa saveur !
Mais dans le coeur d’Onirym une tache sombre grandit. Il en veut terriblement aux Dieux de ne pas être intervenus ! Ils auraient pu épargner tant de vies, tant de sacrifices inutiles …
Heureusement il y avait Deds73 ! Mais tant d’autres auraient pu venir. Lucy et Joël l'ont payé de leur vie, mais cela n'a pas fait réagir les Dieux plus que cela ...
Il se laisse envahir par la rage et le désespoir, lève le poing vers la lune qui filtre au travers d’une fenêtre et maudit les Dieux !
Une main douce et froide vient se poser sur son épaule. Il se retourne, surpris, et sa stupéfaction grandit encore lorsqu’il se rend compte de qui est à ses côtés : La prêtresse des Limbes !
Onirym : vous arrivez toujours à des moments pas possible vous !
Prêtresse : mais peut être est ce vous qui m'appelez à ces moments là ?
Onirym : que faites vous là ? Je croyais que l’on ne devait plus se voir ?
Prêtresse : je suis venue porter un message du Dieu de la Mort …
Onirym : il doit être content ! On lui a bien remonté ses effectifs !
Prêtresse : là n’est pas la question. Le Dieu de la Mort n’est pas ni plus ni moins satisfait lorsque des flots d’âmes se présentent aux portes du royaume. Son rôle est de les accueillir, toutes et leur apporter la paix et la sérénité pour l’éternité. Mais se qu’il déteste par dessus tout s’est qu’on lui vole des âmes. Et avec la mort des nécromants et de leur reine Arienara les âmes sont maintenant en sécurité. Aussi m’a t il envoyé pour vous faire une offrande. Il vous offre l’immortalité.
Onirym rit ! Alors là ! J’ai tellement mis le bordel ici bas qu’il ne veut surtout pas que je vienne un jour faire la même chose en son royaume ?
La prêtresse a l’air contrariée : Non pas du tout ! C’est un énorme privilège qu’il vous accorde là ! C’est la première étape vers la déification !
Onirym fait un grand geste de la main : je n’en veux pas de votre immortalité, de votre déification et de tout cela ! Si c’est pour finir comme tous ces trous du cul de la Cité d’Argent ce n’est pas la peine ! Je préfère rester ici bas, avec les hommes, et partager leurs souffrances, leurs peines, leurs joies ! Je préfère vivre !!! Mais en sachant qu’un jour tout s’arrêtera. La vie sans la mort n’a pas de saveur, pas d’importance… C’est bien pour ça qu'ils n'ont rien fait …
Prêtresse : mais … Vous n’allez pas refuser le cadeau de la mort quand même ???
Onirym : non, je ne vais pas le refuser, s’il accepte d’en changer les termes. Si vraiment il veut me remercier, et remercier tous ceux qui se sont battus et sont morts pour permettre aux innocents de survivre, alors qu’ils leur accorde une seconde chance ! Faites qu’il me rende tous mes amis ! Qu’ils les ramènent à la vie !!!
La prêtresse des Limbes s’écarte doucement et fait un sourire triste : vous savez bien que cela est impossible …
Onirym la repousse, énervée : ça suffit ! Arrêtez avec ce discours ! Je sais bien que si vous le voulez vraiment, tout est possible pour vous !
Prêtresse : non, je vous assure, il existe des règles, même pour les Dieux … Les enfreindre peut conduire à de terribles catastrophes, ce n’est pas à vous que je vais l’apprendre… Mais le Dieu de la Mort a entendu votre demande, et il vous l’accorde. Pour une personne. Choisissez qui vous voulez faire revenir du royaume des morts et il libérera son âme, pour la faire revenir parmi vous.
Pour les malins :
choisissez quel personnage (et un seul !) sera ressuscité par le Dieu de la Mort ?
Les journées ont passé. La vie a repris son cours.
Tout autour de la cité, les campagnes environnantes portent encore les stigmates de la bataille.
Surtout le lieu du sacrifice rituel, là où le portail s’est ouvert …
L’herbe reste roussit, rabougrit, et repousse très difficilement. La roche est craquelée et fissurée dans un amas chaotique.
Mais loin, loin sous le sol, dans l'obscurité, et la chaleur humide des entrailles de la terre, se trouve une petite graine. Une toute petite graine.
Répondant à un appel, un léger frémissement de la nature, elle s'éveille …
Elle se met à germer, puis les racines s’accrochent dans la terre, et une petite tige sort du sol au milieu de ce chaos de roche et de désolation.
La tige vibre au gré du vent, se nourrit de la terre, de l’eau et du soleil.
Au bout de quelques temps, une feuille émerge, puis deux, puis trois ! La petite pousse croît ...
Les saisons passent …
La jeune pousse grandit, devient arbrisseau, puis arbuste et grandit encore, de plus en plus vite à mesure qu’elle se nourrit de l’essence de la nature et de la mana qui parcourt le monde !
Au bout de quelques mois, c’est un arbre gigantesque qui pousse à l’emplacement du portail, scellant définitivement cette fissure vers un autre monde.
Les racines de l'arbre s'étalent dans toutes les directions, bien au-delà de sa ramure ! Elles traversent le monde, s’étendent dans tout Arendyll, unissant ainsi tous les courants élémentaires. La mana traverse les racines, inonde le monde, comme une pluie au milieu du désert.
Et partout la nature renait, jaillit, croît, prospère !
Yggdrasill “l’arbre qui soutient le monde” est de retour. Les Grands Anciens bénissent le monde et la magie afflue à nouveau !
Le vieux machin ouvre les yeux. Il voit enfin de nouveau la terre ! La beauté d’un ciel d’azur, la clarté du jour, la chaleur du soleil qui réchauffe son écorce et ses feuilles …
Il frémit de bonheur et ses feuilles font un concert de bruissement qui se répand comme une onde de joie sur le monde.
Au travers le royaume, toutes les créatures magiques, tous les mages et les sorciers sentent le changement ! La magie envahit de nouveau toute chose. Elle est présente, partout ! Fini les maigres filets d’essence, il y a maintenant des sources, des rivières d’énergie qui coulent dans les entrailles de la terre, portées par les racines d’Yggdrasill.
La nature devient une source de mana. Et maintenant que l’arbre de vie est replanté sur le monde, cette source de mana va affluer et pourra être utilisée par tous les mages et les créatures magiques pour se nourrir et prospérer.
Fini les pactes avec les démons pour échanger du pouvoir, la nature va pourvoir à toute chose…
Un nouveau monde s’éveille.
FIN du Livre 2
Retrouvez la suite des Chroniques d'Onirym dans le livre 3 : Le barzougalpahium !