C’est encore l’esprit tout embrouillé par ses récentes aventures qu’Onirym se réveille.
Il est ballotté doucement par le rythme de la diligence. Il ouvre les yeux.
Onirym est de retour dans cet étrange attelage, au milieu de la forêt spectrale.
Onirym : mais qu’est ce que je fais là encore ?
Une voix lui répond : Bonjour, je me demandais quand vous alliez vous réveiller. Vous êtes déjà venu ici ? Vous savez donc où l’on va ?
Onirym regarde sur la banquette opposée et remarque un homme assis en face de lui. Ou plutôt une sorte de petit homme, un gnome peut être, à l'accoutrement étrange.
Onirym : bonjour
Gnome : vous avez l’air surpris ?
Onirym : oui en effet. La dernière fois que j’ai atterri ici, j’étais en compagnie d’une charmante jeune femme, peu loquace, mais qui avait un chat qui parle …
Gnome : je ne les ai pas rencontré … Au fait, je m'appelle Phib et vous ?
Onirym : je suis Onirym, enchanté. Ça fait longtemps que vous êtes là ?
Phib : je ne saurais pas trop dire, vous pouvez m’en dire plus sur cet endroit ? Et où nous nous rendons ? Si vous voulez le fond de ma pensée … Je crois que je suis mort …
Onirym : Ah bon ? Et qu’est ce qui vous fait dire cela ?
Phib : et bien déjà cette étrange et lugubre forêt. Et puis jetez un coup d'œil à notre cocher et à ses chevaux
…
Onirym se contorsionne et passe la tête par une ouverture de la diligence. Il aperçoit les montures qui tirent la diligences : deux imposants chevaux noirs, qui avancent, sans un bruit, malgré l’allure rapide. Des panaches de brume ou de fumée semblent s’échapper de leurs flancs et de leur crinière. Onirym se tortille un peu plus pour apercevoir le cocher. Un homme est assis sur le siège, au-dessus de la diligence. Ou plutôt une ombre, drapée dans un grand manteau noir …
Onirym : hé toi le cocher, tu peux t’arrêter ? J’aimerai descendre !
Phib : vous épuisez pas, il répond jamais, j’ai déjà essayé.
Onirym retourne s’installer dans la diligence et dit : Ok notre attelage est des plus étranges. Mais qu’est ce qui vous fait croire que vous êtes mort ? C’est bizarre comme pensée ?
Phib : oh vous savez, je suis quelqu’un de plutôt rationnel en général. Je suis inventeur. Je crée des marionnettes et des automates. Regardez !
Phib sort d’une besace un lapin et une chouette faits de bois et de divers engrenages compliqués.
Onirym : ils sont beaux !
Phib : merci. Ce sont mes préférés. Le souci est que je les ai fabriqués il y a très longtemps et je les ai perdus. Mais quand je me suis réveillé ici, ils étaient prêts pour moi.
Onirym : oui c’est étrange …
Phib : et il y a d’autres choses aussi … Mes derniers souvenirs … J’étais dans mon atelier, je mettais la touche finale à ma dernière invention. Une machine capable de transformer l’eau en un breuvage noir et amer, mais particulièrement délicieux ! Je produis ce breuvage à partir de petites graines que je fais d'abord brûler, puis je les réduis en poudre. En faisant passer de l’eau à une certaine température, j’obtiens cette boisson délicieuse. Elle a des vertus intéressantes, en buvant plusieurs tasses, cela me permet de rester éveillé longtemps ! Ainsi j’ai plus de temps pour créer des inventions et des machines !
Onirym : génial … hé ?
Phib : et bien la machine a explosé. Je ne sais pas ou j’ai fais une erreur, c’est ce qui me tracasse le plus … Je ne pourrais pas la réparer. Mais l’explosion a été particulièrement violente. C’est peut être parce que j’ai rajouté au mélange de la poudre de feu … Mais dans mes derniers souvenirs, mon laboratoire était ravagé et en flammes, et moi je ressentais de vives douleurs. Puis je me suis réveillé ici. et vous c’est quoi votre histoire ?
Onirym : moi, tout a commencé dans une bibliothèque, lorsque j’ai trouvé une sphère magique. Depuis, elle m'envoie un peu partout, dans des lieux très loin de chez moi. J’essayes de rentrer. Et lors de l’un de ces transferts j’ai atterri ici. Le chat qui cause m’a envoyé ensuite dans une étrange cité abandonnée …
Phib : ok je vois … Ça ne nous avance pas beaucoup.
Onirym : on pourrait essayer de sauter en marche ?
Phib : j’ai pas trop envie de me retrouver à pied dans cette étrange forêt. Je crois qu’elle me fait encore plus peur que notre embarcation et sa destination inconnue. Et puis regardez bien, il n’y a aucune porte dans cette diligence !
Onirym : ha oui c’est vrai, je n’avais pas remarqué.
D’un seul coup, la diligence s’arrête. Aucun bruit, le silence absolu.
Phib et Onirym retiennent leur souffle. Ils sentent que quelque chose va se passer …
Puis Phib pousse un cri ! Il regarde ses mains, ses bras, incrédule. Il est en train de disparaître !
Phib : je crois que pour moi c’est la fin du voyage ! Adieu l’ami, j’ai été heureux de discuter avec vous.
Phib devient rapidement transparent et disparaît.
Onirym entend alors une grosse voix gutturale : vous n’avez rien à faire ici !
Il sent une violente douleur lui vriller la tête, puis il est comme projeté et tombe dans un puit noir et sans fond …
Thondurm réfléchit, trop, et ça lui donne mal à la tête. Et il aime pas avoir mal au crâne, sauf après une bonne cuite, mais là, c’est même pas le cas ! Il retourne le problème dans tous les sens mais ne trouve pas de solution.
Thondurm : mais comment on a pu en arriver à une situation pareille ! C’est pas possible ! Même si j’avais voulu mettre le bazar, je ne serais jamais arrivé à un tel désastre !
Thondurm fait les cents pas dans ces appartements, l’air furax.
Thondurm : ha si je mettais la main sur les deux cloportes qui ont voté pour ce je sais pas quoi de Petibon ! On ne sait même pas qui c’est ce gars ! Ça me révolte ! S’ils avaient voté pour moi, j'aurais gagné et on n’en serait pas là aujourd’hui !
Une voix douce et calme lui répond : calmez vous maître nain, vous allez attirer l’attention sur nous. Vous savez que les murs de ce palais ont des oreilles maintenant ! Et je n’ai pas envi que l’on me sache ici. Mais avouez, vous ne m’avez pas fait venir juste pour trouver ce dénommé Graffard Petitbon ? Vous avez une autre idée derrière la tête ?
Thondurm s’arrête et se tourne vers son interlocuteur. Le roi des rats, l’hallfeling prince des voleurs, est confortablement installé dans un fauteuil en train de fumer une longue pipe.
Thondurm : évidement que j’ai une idée derrière la tête ! Il faut foutre ce Sir de BlackWood dehors ! Et vite fait !
Roi des rats : j’ai cru comprendre qu’il avait rudement bien mené son coup ! Arriver juste au moment où Sinara est nommée régente … En tant que père il s’est arrogé ces fonctions ! C’est malin ! Et pas fortuit. Si vous voulez mon avis, il a des complices en interne, dans le palais.
Thondurm : je sais bien ! C’est pour ça que j’explore toutes les pistes ! Et ce maudit Petibon en est une. Sinon il y a des maudits elfes ! En tout cas c’est pas Sinara. Vu comme elle était furax de revoir son père ! Elle lui a même griffé le visage ! Depuis elle est enfermée dans ses appartements, sous bonne garde.
Roi des rats : et les autres membres du conseil ?
Thondurm : je ne sais pas trop … Marion et les orcs ont été consignés dans leur campement avec interdiction d’en sortir. Beornbryn a été mis aux arrêts et jeté en prison. Donc je ne pense pas qu’ils soient complices. Qu’en au autres … C’est bien là la question ! Quant à moi, je sens bien que je suis sur la corde raide. Il n’a aucune raison officielle pour me retirer mes fonctions mais je sens bien qu’il me surveille et qu’il attend le moindre prétexte pour me virer et mettre un de ces hommes à ma place. Ça m'énerve !!!
Roi des rats : qu’est ce qui vous énerve le plus ? Que la situation vous échappe ? Que vous avez trouvé plus fort que vous niveau magouille ? Que vous vous sentiez pieds et poings liés ?
Thondurm pousse un grognement : vous vous savez remonter le moral des gens, il n'y a pas à dire … Je croyais pas dire ça un jour, mais il faut qu’Onirym revienne et vite pour que tout rentre dans l’ordre !
Le roi des rats fait un sourire énigmatique : et bien, Thondurm, le protecteur du royaume, défenseur d’Onirym ! Je suis heureux d’avoir assisté à cette scène !
Thondurm : vous fichez pas de moi vous ! Je suis sûr que si je vous livre à ce tyran il serait content, ca me permettrait de monter en grâce à ces yeux !
Roi des rats : ne dites pas de bêtises Thondurm, vos menaces sont vaines. Vous savez pertinemment que si vous faisiez cela, le Sir de BlackWood vous mettra aussitôt en prison pour complicité avec les gredins du royaume …
Thondurm : vous avez raison, excusez moi. Je suis désespéré ! Ma marge de manœuvre est étroite : je n’ai pas beaucoup de solutions : faire profil bas et attendre qu’Onirym vienne arranger la situation … On ne sait même pas s’il va rentrer ! Si cela se trouve il est mort !
Sinon essayer de faire invalider la nomination de Sinara en tant que régente, ca mettrait fin à la main mise de ce triste Sir sur le royaume ! Mais cela m’exposerait clairement, et j’aurais le droit qu’à une seule chance. En plus c’est pas sûr qu’il accepte, il pourrait ensuite prendre le pouvoir de force ! Il faudra donc que je prévois un plan B, avec vous ? Les orcs ?
Roi des rats : c’est pour cela que vous m’avez fait venir … Savoir si je suis prêt à risquer ma vie et celle de mes hommes de l’ombre pour votre petite conspiration ? Vous pensez vraiment qu’une bande de voleurs a une chance face à des chevaliers et une armée ?
Thondurm : vous connaissez la ville mieux que quiconque, c’est un avantage. Et si les orcs sont de notre côté ça fera un force de frappe conséquente. Après il y a les mages … S’ils se joignent à nous c’est tout bon pour la victoire. Mais j'ai aucune confiance en ce maudit Thuringwethil et son neveu Gaelfen …
Roi des rats : et vous avez confiance en moi ? Qu’est ce qui vous dit que ce n’est pas moi le traître ?
Thondurm regarde l’halfeling d’un air incrédule et complètement paniqué.
Dans la grande salle de la sinistre tour, en quelque lieu étrange, se trouve le roi des Ombres, à la couronne de fer.
Il est assis sur son trône et écoute avec attention le rapport de son espion.
Espion : alors, les choses ne se déroulent pas tout à fait comme prévu. Nos agents se sont fait massacrer. J’avoue que la scène est un peu confuse, mais apparemment un gros ours, des gobelins, d’autres trucs étranges et une bande de chevaliers énervés sont venu perturber leur mission. Du coup Onirym est toujours vivant. Je pense que quelqu’un ou quelque chose l’aide dans l’ombre et fait en sorte de nous mettre des bâtons dans les roues.
Le roi pousse un petit gloussement : des bâtons dans les roues … Elle est drôle celle-là. Même si la situation ne prête pas particulièrement à rire !
Le roi lève un bras décharné et le laisse retomber mollement contre l’accoudoir du trône.
Roi : je suis en train de littéralement me dessécher ! Je vais finir en poussière dans pas longtemps si vous ne vous bougez pas les fesses rapidement !
L'espion s’incline et se prosterne face au trône : j’en ai bien conscience, vénérable Seigneur des Abymes ! Je vous assure que nous faisons tout notre possible pour vous apporter la relique et identifier qui est notre ennemi qui protège Onirym.
Roi : comme vous m’avez fait rire avec votre blague, je ne vais pas vous écorcher vif. Et puis je manque d’hommes pour me permettre de commencer à passer mes nerfs sur vous. Mais il faut montrer l’exemple, aux autres, vous comprenez ?
L’espion, pas rassuré répond : heu … non en fait je comprends pas trop ou vous voulez en venir ?
Roi : mangez vous le petit doigt de la main gauche, ça suffira pour l’exemple. Et ça vous motivera à être efficace ! Nous n’avons plus le temps ! Il faut agir vite ! Alors envoyez de nouvelles troupes, trouvez-moi le protecteur, rapportez-moi la relique ! Faites ce pour quoi vous méritez de vivre ! Si j’avais quelques centaines d’années de moins, je vous jure que j'aurais été chercher ce truc moi même et cela n’aurait pas fait un pli !
L’espion, tout tremblant, prosterné au sol répond : bien grand maître, il en sera fait selon vos désirs.
Roi : et arrêtez vos formules pompeuses avec moi ! c’est énervant à force ! Au fait, ça me fait penser, vous avez retrouvé la trace de la sorcière ?
L'espion répond d’une toute petite voix : nous y travaillons âprement Lord de Noirceur.
Le roi s'avachit sur son trône en poussant un long soupir : ça veut dire non… Bande d’incompétents … Du coup je vous interdit de mettre du sel ou tout autre aromatique sur votre petit doigt avant de le boulotter …
Excusez moi mais à un moment il faut que je sévisse, c’est une question de crédibilité. C’est pas facile d’être un grand méchant, il y a une aura, un charisme à maintenir, que ce soit envers ses ennemis ou avec ses troupes ! Et nous on peut pas trop faire copain copain, c’est pas crédible. Alors il ne reste que la peur, la crainte et la cruauté. Ça tombe sur vous mon pauvre gars, désolé. En fait non pas désolé. C’est pas crédible sinon.
Le roi des Ombres fait un petit signe de la main en direction d’une imposante créature faite de ténèbres qui patientait dans un coin de la salle.
roi : allez-y, faites ce que vous avez à faire. Envoyez d’autres sbires pourrir la vie de ce maudit Onirym ! Envoyez aussi d’autres corbeaux parcourir les Ombres et retrouvez moi la sorcière.
L’ombre s’avance d’un pas et s’incline. Une puissante voix grave et d’outre tombe s’élève : me permettez vous un conseil seigneur ?
Roi : allez-y …
Ombre : ne serait-il pas temps d'appeler votre frère à la rescousse ?
Un air de rage et de dégoût traverse le visage émacié du roi : pensez- vous à Uriel ? je ne suis pas assez désespéré pour cela ! Je ne lui ferait pas ce plaisir. Contentez vous d’obéir !
L’Ombre s’incline : bien maître, comme vous le désirez.
L’ombre fait demi-tour et quitte la pièce.
Quelques instants plus tard, de nombreuses créatures des ténèbres s’échappent de la tour et s’en vont vers leur sinistre mission.
Dans la salle du trône, l’espion, la main ensanglantée, finit son encas en étouffant des bruits de douleur et de dégoût …
Onirym reprend conscience et ouvre les yeux.
Il est face à la mer, au sommet d’une falaise surplombant un océan déchainé. Les eaux sont noires et tumultueuses. Un grondement sourd et imposant monte des flots déchainés. Des vagues puissantes et majestueuses se lancent à l’assaut de la roche, telle une armée s'élançant pour prendre d’assaut une muraille. Mais la falaise est imposante et vertigineuse.
Tout autour d’Onirym les roches sont chaotiques, formant des blocs épars et hérissés, comme des lames s’élevant vers le ciel.
Le lieu est désert, mais sinistre et lugubre. D’un côté cette mer agitée, de l'autre des montagnes s’élevant à pic, au-dessus des nuages.
Mais Onirym n’a pas le temps d'étudier plus longuement ce paysage chaotique, car il entend du bruit derrière lui. Il se retourne, méfiant, et voit plusieurs ombres évoluer entre les rochers et se rapprocher de lui.
Il a juste le temps de dégainer son arme et se retrouve encerclé par les ninja-assassins ! Ils sont au moins une dizaine et d’autres continuent d’avancer dans sa direction.
Onirym pense : ainsi donc c’est bien après moi qu’ils en ont …
Dans un geste désespéré, Onirym plonge vers le premier, afin de créer une ouverture et pouvoir s’enfuir.
Sa lame frappe violemment l’épaule de son adversaire, surpris. Onirym ne cherche pas plus longtemps l’engagement, il plonge sur le côté et court, comme un lapin, pour s'échapper.
Sans un bruit, les assassins se jettent à sa poursuite.
La situation est désespérée, ils sont nombreux, rapides et déterminés.
Onirym, tout en continuant à s’enfuir, cherche du regard un point avantageux, le long d’un rocher ou derrière un arbre, pour couvrir ses arrières, et fait face à ses ennemis.
Autour de lui les traits mortels des assassins ricochent sur la roche. Une douleur fulgurante envahie sa jambe ! Une étoile du matin vient de se figer dans sa cuisse !
Onirym tombe au sol poussant un cri de douleur. Il se relève et fait face à ses ennemis.
Il sert les dents, et les doigts sur la garde de sa lame.
Il pense : Adieux Sinara, on se reverra un jour …
Les assassins, sans un bruit, se jettent sur lui. Les coups pleuvent. Onirym se défend, comme un beau diable, les coups pleuvent, il arrive à blesser plusieurs assassins, mais d’autres prennent inexorablement le relais.
Il se fait rapidement dépasser par le nombre.
Le corps meurtri, criant de douleur, Onirym résiste ! Plusieurs blessures le font terriblement souffrir, le sang s’écoule le long de ses bras et de ses jambes. La douleur est de plus en plus intense … Il a du mal à tenir sa lame et sa vue commence à se brouiller …
Onirym murmure : sale journée, avant de s’écrouler. Les ténèbres le saisissent …
Onirym reprend conscience. Il est secoué dans tous les sens. Son corps est endolori et le fait terriblement souffrir.
Il ouvre les yeux, quelqu’un est en train de le réveiller en lui donnant des coups de pieds !
La douleur est là, dans tout son corps. Ca veut dire qu’il n’est pas mort, ou sinon l'enfer va être long, très long !
Onirym ouvre péniblement les yeux et tourne la tête vers l’individu. Il voit un homme à l’allure étrange.
Il est grand, le corps fin, de longs cheveux blancs, descendant sur ses épaules. Il a la peau d’une blancheur surprenante. Il est vétu d’une tenue de cuir noir qui contraste avec la paleur de sa peau et de sa chevelure.
L’air sévère, le regard dur, l’homme l’observe de ses grands yeux noirs.
Onirym lui fait signe d’arrêter de la frapper, et se redresse légèrement. Il prend quelques instants pour scruter les environs.
Il est toujours au même endroit. Autour de lui, les cadavres des assassins forment une ribambelle macabre.
Onirym dit d’une voix faible : pourquoi vous m’avez frappé ?
L’homme répond, sur un ton neutre et détaché : pour voir si vous étiez encore vivant.
Onirym : vous avez pas trouvé un moyen plus sympathique pour vérifier ?
Homme : j’avais pas envie de me pencher, la flemme …
Onirym : ok ok super … Bon bin merci quand même. Pour avoir buter tous ces assassins.
Homme : c’est pas moi qu’il faut remercier, mais Stormbringer.
Onirym : Stormbringer ? Connais pas …
Homme : il vaut mieux pas. C’est mon épée-démon. Elle avait faim et les âmes de ces hommes semblaient à son goût. Par contre elle n’a pas voulu que je prenne la votre.
Onirym : c’est une bonne nouvelle, pour moi …
L’homme se penche vers Onirym et lui tend une fiole en cristal dans laquelle se trouve un liquide rouge et épais.
Homme : buvez cela, ça va vous remettre sur pied.
Onirym : un grand merci. Malgré quelques appréhensions, Onirym boit le contenu de la fiole. De toute façon il est déjà à moitié mort, c’est le bon moment pour faire des expériences étranges …
Le liquide est plutôt bon, avec un arrière goût de framboise.
Instantanément Onirym se sent beaucoup mieux ! Les douleurs disparaissent, le sang s’arrête de couler et les plaies commencent même à se refermer !
Onirym : ouais c’est super efficace votre truc !
Homme : c’est clair … Mais si je veux continuer à discuter avec vous sans vous voir vous vider de tout votre sang et faire des grimaces de douleurs, je suis bien obligé …
Onirym : et bien merci, qui dois je remercier en fait ?
Homme : vous pouvez m'appeler Elric, le nécromancien.
Onirym se redresse, range sa lame dans son fourreau, arrange un peu ses vêtements déchirés …
Elric se retourne et s’éloigne un peu. Il dit, toujours d’un ton placide : je vais faire du feu et mettre un truc à chauffer. Si Stormbringer s’est gavée, moi j’ai rien mangé. Rejoignez moi quand vous aurez fini de reprendre vos esprits …
Onirym souffle un bon coup, à part ses vêtements déchirés il ne reste aucun stigmate sur son corps du combat qui vient d’avoir lieu.
Autour de lui, il y a au moins vingt cadavres …
Sur certains, il manque des bouts. Des bras et des jambes traînent de si delà …
D’autres sont comme tout ratatinés, desséchés …
Un frisson parcourt Onirym en contemplant ce spectacle.
Onirym remarque que tous les assassins portent un masque et une capuche. Ce sont les mêmes que ceux qui l’ont pourchassé avec Sorel dans les ruines, puis dans la forêt …
Onirym pense : mais qui sont ces gars ? Et pourquoi ils veulent me trucider ?
Machinalement il s’avance vers le cadavre le plus proche et soulève son capuchon. Intrigué, il arrache son masque.
Un peu plus loin, Elric est assis sur un tronc d’arbre près d’un bon feu. Il met à cuire un malheureux lapin qui a eu l’imprudence de passer par là.
D’un seul coup il entend un cri. Un cri de stupeur et de peur !
Elric lève le regard et s’adressant à Onirym : qu’est ce qu’il y a encore ? Vous en avez pas encore assez qu’il faut gueuler comme un âne maintenant ?
Onirym, d’une voix tremblante, lui répond : la vache, venez voir ça !
Elric se lève et s’avance vers le lieu du massacre.
Onirym est debout, immobile et blanc comme un cierge en train de scruter un cadavre.
Elric : bon il y a quoi encore ?
Onirym, incapable de parler lui montre du doigt le visage du cadavre.
Elric se penche et regarde le mort. Il lui dit vaguement quelque chose …
A ses côtés il entend Onirym qui murmure : c’est moi … Ce mec à ma tête, il me ressemble, c’est moi …
Elric tourne les talons et va retirer leur masque aux autres assassins. Ils ont tous le même visage, les mêmes traits qu’Onirym.
Elric retourne vers du pauvre et stupéfait aventurier et lui met une grande claque dans le dos. Allez venez avec moi manger et vous réchauffer ! La différence entre eux et vous c’est que vous êtes vivant …
En retournant vers le campement il ajoute : vous avez pas une famille un peu toxique et rancunière vous ? Je trouvais que la mienne était pas mal, mais là vous faites fort !
Onirym répond mécaniquement : non … Je sais pas … Je ne les avais jamais vus …
Elric : Allez mon gars, assieds toi et reprends des forces ! Après tu me raconteras ton histoire …
Peu à peu Onirym reprend ses esprits, le ventre plein, réchauffé par le feu crépitant.
Onirym : alors, quoi vous dire … Je sais où je suis ni qui étaient ces clowns et encore moins pourquoi ils m’en voulaient. Mais encore une fois, merci …
Elric pose à ses côtés une longue épée bâtarde d’un vif éclat d’argent. La garde et la lame sont ornés de nombreux décors compliqués.
Elric lui fait un signe : c’est Stormbringer mon épée-démon de compagnie. Vous êtes à Melniboné, sur les landes désolées. Je suis un vagabond dans mon propre royaume … Mes pas me ramènent systématiquement en ces terres, par un sombre caprice des Dieux.
Onirym pousse un petit rire nerveux : vous aussi les Dieux vous en veulent ? Moi j’aimerai bien retrouver mon royaume … Et surtout ceux qui y habitent, mes amis et ma douce Sinara …
Elric : oui certains Dieux sont capricieux, ils n'aiment pas lorsque vous refusez le destin qu’ils ont choisi pour vous. Après ils vous le font payer …
Onirym n’ose pas interrompre son ténébreux sauveur, il remarque une grande tristesse dans son regard.
Mais rapidement ses yeux reprennent leur noirceur et leur dureté.
Elric regarde alors Onirym droit dans les yeux et déclare : bon maintenant on va arrêter de rigoler et tu vas me dire vraiment ce que tu es venu chercher par ici et pourquoi Strom t’as épargné …