Le barzougalpahium

Francesco

Leonardo se penche vers l’objet et l’observe sous tous les angles en continuant à marmonner.

Puis il se lève, va chercher un lourd grimoire sur une étagère et vient le poser sur la table. Il le feuillette frénétiquement et s’arrête sur une page remplie de croquis. Ils représentent l’objet que tient Onirym !

Onirym : mais c’est elle ! C’est la sphère !!!

Leonardo : oui mais non, c’est impossible. Je ne l’ai jamais fabriquée. Ces schémas sont purement théoriques.

Onirym : de quoi s’agit- il ?

Leonardo : du barzougalpahium. C’est comme cela que je l’ai nommé.

Onirym : et ça marche comment ?

Leonardo : c’est bien là le problème ! Je n’en ai aucune idée ! Comme je vous l’ai dit, j'ai imaginé cet objet pour des recherches, mais c’est purement qu’un concept, une allégorie, une abstraction ! Il ne peut pas fonctionner !

Onirym : et bien je vous confirme que si !

Leonardo semble plongé dans ses réflexions, il réfléchit tout haut : c’est quand j’étudiais l’alchimie, et le pouvoir de l’essence du monde … Comment la pierre philosophale pourrait plier l’espace et le temps pour permettre à un voyageur de traverser les replis de la réalité … Je n’y crois pas ! Ce n’est pas possible !

Onirym : si c’est possible ! Si vous ne l’avez pas fabriqué, quelqu’un l’a fait chez moi ! Aidez-moi à le faire fonctionner ! Aidez-moi à retourner chez moi !

Leonardo reste immobile et silencieux un long moment … Puis il se lève brusquement et déclare : je vais vous aider à rentrer chez vous !

Onirym : super !

Leonardo : mais avant vous allez me rendre un grand service !

Onirym : quoi ?

Leonardo : je pense qu’en principe je suis en mesure d’activer la pierre et de vous renvoyer chez vous. Mais j’ai besoin de vous pour un truc …

Leonardo part dans un coin de son atelier et en revient avec une toile sur laquelle figure une esquisse.

Il reste quelques instants à la contempler, Onirym n’osant pas l’interrompre.

Puis il déclare : je n'arrive pas à peindre ce tableau, ça m'obsède ! J’ai essayé de griffonner quelques trucs d’après mes souvenirs mais ce n’est pas suffisant … Il faut que vous alliez me chercher le modèle, la jeune femme, que je puisse finir son portrait !

Onirym : c’est tout ?

Leonardo : oui mais ça ne va pas être facile … Il y a des chiens, et son mari est très jaloux. Francesco m’a interdit d’approcher de sa maison et de parler à Lisa ! Il en a marre que je vienne tous les quatre matins pour tenter de la convaincre de poser pour moi !

Onirym : et pourquoi ne pas changer de modèle ?

Leonardo : Mais vous êtes fou ? Ou bête ? Ou les deux ? C’est elle que je veux comme modèle ! Elle est parfaite, ses yeux, sa chevelure, son front, son menton, toutes les proportions sont parfaites pour sublimer ma toile ! C’est elle et personne d’autre !

Onirym : ok ok, ne vous emportez pas … Ça peut être dangereux à votre âge … Et où puis-je trouver cette Lisa ?

Leonardo : Lisa Gherardini vit chez son mari, Francesco di Bartolomeo di Zanobi del Giocondo, un marchand d'étoffes florentin ! Vous pourrez l’approcher en journée, lorsque son mari vaque à ses affaires ! Mais attention, ne parlez pas de moi ! Et vous n’aurez qu’une seule chance ! Les domestiques sont méfiants et promptes à vous rosser à coup de bâtons ou à lâcher les chiens !

Onirym : super …

Leonardo : tenez, couchez-vous là ! il faut que vous soyez en forme ! Vous irez demain !

Onirym : mais comment vais-je faire pour lui parler ?

Leonardo : pour ça débrouillez vous ! Ensuite vous avez de la chance, Lisa a reçu une bonne éducation, elle parle donc le français, comme vous !

Le lendemain matin, après un brin de toilette pour se rendre présentable, Onirym suit les indications de Leonardo et se dirige vers la villa des Bartolomeo dans les hauts de Florencia.