Plusieurs semaines ont passé depuis qu'Onirym a quitté la vie tranquille et douillette du village halfeling ….
Il s'est installé dans un petit renfoncement rocheux pour se protéger de la pluie ! Pas possible de faire du feu … Il va encore passer une super nuit … La vie de vagabond n'est pas si rigolote qu’elle en avait l’air ! La faim, le froid, les ampoules aux pieds, les p'tites bêtes … Il y a tout un tas de trucs pour faire en sorte que la jolie balade tourne au cauchemar …
Mais pour autant, pas question de retourner au village ! Il ne s'est jamais senti aussi vivant que depuis qu’il court les routes, allant là où ses pas le porte, sans but ni contrainte !!!
Il commence à somnoler, bercé par le plic ploc des gouttes de pluie dans les arbres …
Quand il entend subitement un craquement.
Il ouvre les yeux, tous les sens en alerte et sort son poignard …
Trois silhouettes apparaissent face à lui. Trois hommes portant des capes de cuir, l’un d’eux à un arc braqué sur lui, les deux autres ont leur épée à la main …
Homme : alors gamin on barbotte ?
Autre homme : c’est gentil de sortir tes affaires pour nous les donner !
Onirym sert son poignard très fort dans sa main. Il se lève, dos à la paroi rocheuse et fait face aux trois hommes.
Homme : sérieux ? Tu veux te battre ?
Autre homme : soit raisonnable gamin ! Qu’est ce que tu comptes faire contre trois hommes armés ? Ta vie n’as donc aucune importance ? Lâche ce poignard et on te fera rien !
Onirym hésite un peu puis lâche son arme.
Les trois hommes baissent également leur garde.
Ils s’installent sous l'abri comme si Onirym n’était pas là …
Le premier arrive à allumer un feu, le second sort du pain et de la viande séchée, et le troisième une outre pleine de vin.
L’un des malandrin récupère le poignard d’Onirym et l’inspecte avec attention : dis donc gamin c’est une sacré lame que tu as là ?
Onirym : oui c’est un ami qui me l’a donné.
Homme : et bien je te remercie pour le cadeau ! Et la lame disparaît entre les mains de l’homme.
Onirym commence à protester mais le second malandrin lui fourre un bout de pain dans la bouche pour le faire taire : tu crois qu’on est tes potes ? C’est la taxe de séjour mon gars … Fallait pas t’installer dans notre planque …
Onirym : quoi ? Cet endroit ? Votre planque ?
Homme : tu t’y es bien installé, c’est qu'elle est suffisante non ?
Onirym : Et je croyais que la forêt était à tout le monde ?
Les trois voleurs rigolent !
Homme : t’es un comique toi ! Du coup je vais te laisser le choix : demain matin, soit tu repars en slip et tu nous laisses toutes tes affaires, soit tu nous suis et tu rejoins notre groupe de bandits de grands chemins …
Quelques années ont passé ... Onirym a rejoint la bande de brigands.
C’est une belle nuit de printemps, la pleine lune brille haut dans le ciel par-dessus la cime des arbres de la forêt.
Onirym est accroupi derrière un buisson … : chut les gars ! Vous allez nous faire repérer ! Le chariot arrive !
Derrière lui, une dizaine de silhouettes se cachent derrière les arbres et les buissons.
Sur le chemin en contrebas, un carriole s’avance, entouré d’une dizaine de soldats en arme.
Un homme au visage crochu, une grande cicatrice lui barrant le visage, s'approche d’Onirym et lui murmure : t’as vu ? C’est le gras lui-même qui conduit la carriole ! T’avais raison, c’est du lourd ! La recette de toute la foire doit être là !
Onirym : moins fort la Fouine ! Oui on a touché le gros là, mais l'or n'est pas encore à nous … Il y a beaucoup de gardes quand même ?
La fouine fait une grimace : t'inquiète, ils seront mort avant de comprendre se qui leur tombe dessus.
Onirym : j’aime pas ça … Ils sont cons, c’est vrai, mais ils ne font que leur boulot … Il y a vraiment besoin de les tuer ?
La fouine : rapidité ! Efficacité ! C’est notre devise, si on prend le risque de les laisser en vie ils vont vouloir se battre … T’as envie de te prendre un coup d’épée dans la tronche juste pour la gloire ? Non ! Alors laisse moi faire !
La Fouine se retourne vers les autres bandits et dit : bon écoutez moi bien, bande de cloportes. On est des professionnels donc il n'y a aucune raison que cette mission foire, si vous faites bien se qu’on attend de vous. Les gars en face, ils sont comme vous, dès qu’ils vont voir qu’on est plus nombreux et déterminé ils vont chier dans leurs chausses et arrêter de se battre ! Ce qu’il faut c’est avoir l’air menaçant et déterminé ! Donc je veux en voir aucun hésitez et encore moins prendre ses jambes à son cou et se barrer sous prétexte que l'autre en face fait un peu le mariole et veut vous mettre un coup d’épée dans le cul !
De toute façon si c’est pas eux, c’est MOI qui vous le mettrait ! Et croyez moi, la mienne est plus grosse !
Un des bandits sort de derrière son buisson et lève la main : pour que ce soit bien clair, on est d’accord que là tu nous fait pas un discours imaginé, et que tu parles bien de ton épée et pas d’autre chose ?
La Fouine : parfaitement je vous parle bien de mon épée ! Vous êtes rassurés ?
Bandit : non pas trop, mais ça a le mérite d’être clair et de nous motiver à ne pas nous barrer …
La Fouine : et bien c’est parfaitement le but recherché ! Donc, on va leur tomber dessus et on aura l’air ?
Un bandit lève la main : moi je sais ! On aura l’air de vrais bandits !
La Fouine : oui et pour avoir l’air de vrais bandits on devra être …
Autre Bandit : nombreux ?
La Fouine : mais ce n'est pas vrai ! Vous avez écouté ce que je viens de vous dire ?
Bandit : écouté oui ! Compris ça dépend …
La Fouine : vous devez avoir l’air sûr de vous et menaçants !
Un autre bandit lève la main : excusez moi mais c’est vraiment se que vous avez dit ?
La Fouine : oui dans l’idée …
Le bandit reprend : non parce qu'il me semble que vous avez dit au début “menaçant et déterminé” et là vous venez de dire “sûr de vous et menaçants”. C’est pas pareil …
La Fouine : comment ça c’est pas pareil ? C’est la même idée !
Bandit : oui mais avec des mots différents, du coup ça prête à confusion et ça risque d’embrouiller les plus cons d’entre nous. Je ne dis pas ça pour moi mais pour les copains un peu bas du caisson du buisson d'à côté …
La Fouine murmure entre ses dents : putains je vais me les emplafonner cette bande de blaireaux !
Onirym pose la main sur son épaule : calme toi, regarde ils arrivent. Les gars, tout le monde se planque, ils arrivent !
La fouine lève le bras et fait un geste sec !
Une pluie de flèches vole vers les malheureux soldats.
Trois tombent au sol, morts. Les autres se rendent compte qu’ils viennent de tomber dans une embuscade !
Déjà les bandits foncent sur eux, épée à la main.
Sur le siège de la carriole, un gras monsieur se met à pousser des cris aiguës, comme un cochon qu’on égorge …
Le combat fait rage. Les soldats sont mieux équipés mais largement en sous nombre …
Le gros monsieur saute de la carriole et court dans la forêt.
Onirym le rattrape rapidement, le tire par les cheveux pour le ramener prêt de la carriole et lui met son poignard sous la gorge en criant : lâchez vos armes sinon votre chef est mort !
Le gras monsieur sanglote : faites se qu’il dit !
Les soldats survivants lâchent leur épée. Onirym est soulagé.
Les bandits ligotent tout le monde autour d’un gros arbre. Onirym prend les rênes de la carriole.
La Fouine grimpe à l’arrière et fait des gestes grossiers vers le marchand et les soldats attachés : la compagnie du furet vous remercie pour votre noble contribution à notre juste cause ! Au plaisir de vous recroiser à nouveau sur cette route ou une autre !
Onirym et la petite troupe font de nombreux détours pour rejoindre le camp des bandits de grands chemins.
Le chef, Archibald le vif, les attend juché sur un tonneau : alors les gars ça a mordu ?
La Fouine lui fait signe que oui !
A peine la carriole arrêtée que des hommes se précipitent pour décharger les caisses qui se trouvent à l’arrière.
Un bon coup de pioche et les lourds verrous sautent.
Mais à l’intérieur des coffres pas d’or ! Juste des cailloux et un petit parchemin avec griffonné dessus : haha je vous ai bien eu !
Les voleurs poussent des cris de rage !

Onirym pense intérieurement : trois hommes sont morts pour rien ce soir … Et son cœur se serre.

La fête bat son plein.
Les hommes, les femmes et les enfants dansent autour du gigantesque feu de joie.
Les brigands ont laissé tomber les armes, l’espace d’une soirée, pour prendre les instruments de musique.
Cette fête de l’été est une vraie réussite.
Vivre comme un voleur a quelque chose d’exaltant. Savoir que peut-être demain vous pouvez mourir sous les coups d’un soldat ou pendu au bout d’une corde donne à la vie une saveur toute particulière et intense. La bière, les femmes n’ont pas le même goût … La vraie vie.
Dans un coin la Fouine capte son auditoire en racontant encore une de ses histoires abracadabrantes … Onirym le soupçonne d’inventer ses aventures à chaque fois qu’il les raconte … Mais il n’ira jamais lui dire. La Fouine peut être susceptible et rapide à jouer du couteau … On réveille pas un ours qui dort disait l’ancien et il avait bien raison !
Archibald arrive et vient caler sa grosse paluche sur l’épaule d’Onirym pour le sortir de sa rêverie.
Archibald : allez le jeunot suit moi faut qu’on cause !
Onirym suit Archibald dans une hutte.
Après avoir mangé un peu et bu beaucoup, la vraie discussion commence.
Archibald : j’aimerai savoir avec qui tu roules ta bosses … Fait pas le naïf, je sais parfaitement que tu sais de quoi je cause ! Je suis chef depuis suffisamment longtemps pour savoir quand le vent tourne. Dans le monde des voleurs ça s'appelle la loi de Tod ! Tod était un grand bandit qui a régné pendant près de vingt ans sans se faire prendre … C’est dire s’il était bon et donc si ses conseils sont précieux.
Pour lui, il y a trois menaces qui peuvent amener un voleur de vie à trépas. La première c’est les soldats, la milice, les juges et tous ces culs semblants à la solde des gras marchands sous prétexte moral de protéger leur argent ! Bon ils sont efficaces mais si on sait être malin et pas trop gourmand ça peut se gérer. Le second risque c’est les femmes et l’amour …
La jalousie d’une femme ou d’un soupirant peut facilement vous faire retrouver dans une situation délicate avec une lame entre les omoplates … Sans compter le fait que lorsqu’on est amoureux, on est prisonnier, vulnérable … Prêt à prendre mille risques stupides qui conduisent tous à une mort tout aussi stupide … Crois moi mon garçon c’est trop cher payé pour que la chose soit rentable …
Et enfin la troisième cause de perdition … c’est tes compagnons d’infortune. Il arrive toujours un moment où un de tes lieutenants, compétent, dévoué et serviable vienne à penser par lui même et à se dire qu’il ferait un bien meilleur chef que toi … Il parle à quelques amis, qui finissent par partager son point de vue et en moins de temps qu’il en faut pour dire “Roustifette” tu te retrouve avec une révolte sur les bras, une crise d’autorité, voir de lâches tentatives d’assassinat …
Archibald sort son long poignard et le plante dans le tonneau qui leur sert de table et reprend.
Archibald : donc tu vois petit, si tu veux vivre vieux dans le métier, faut savoir arracher les mauvaises herbes avant qu’elles envahissent le potager.
Onirym est méfiant : mais … je ne veux pas vous tuer … J’ai rien contre vous !
Archibald : je sais mon garçon ! Je ne parle pas de toi mais d’un autre … A l’heure qu’il est, il complote contre moi. Je sens déjà leurs regards intriguant sur moi quand je traverse le camp. Les discussions qui baissent à mon passage, les regards en coin … Il y a des signes qui ne trompent pas ! Et donc il faut que le sang coule. Soit le mien, soit le leur, pour montrer qui est le chef ! Et entre nous je préférerai cent fois que ce soit celui … de la Fouine … On se comprend le p’tit ?
Le regard d’Archibald est noir, intense et donne pas du tout envie de rigoler !
Onirym prend quelques instants pour évaluer la situation. Il est dans la m… Les seuls mots qu’il arrive à prononcer en retour sont : OK chef.
Il ne sait même pas pourquoi il a dit ça. Question de survie sûrement.
Il sort de la hutte encore tout chamboulé et la tête pleine d'interrogations … Pourquoi Archibald lui a dit ça ? Il lui a bien demandé de tuer la Fouine … Pourquoi ne pas régler son problème lui-même … C’est un test de loyauté ? Mais dans se cas il doit faire quoi ???
Quelqu’un le tire par le bras, le faisant sortir de sa torpeur. Il s’agit de Pusenzbet le gnome. Il parle avec un accent à couper au couteau qui fait qu’on ne comprend qu'à peine un mot sur deux … Et il n'a pas dû prendre de bain depuis plus de di ans. D'où son surnom : "elle pue cette bête" - Pusenzbet …
Le gnome lui fait signe de le suivre : t’viens ty par là, l’argouille.
Il l'emmène à l’autre bout du camp, où des hommes sont réunis en cercle, autour de la Fouine.
La Fouine : non non et non ! Montrez vous imaginatif les gars sinon on ne va pas s’en sortir … Déjà je vous fais participer, je vous demande votre avis, je suis sympa mais mettez y du vôtre !
Voyant Onirym arriver, la Fouine lui fait signe et l’interpelle : et toi le jeunot, t’as bien idée !
Onirym : une idée de quoi ?
La Fouine : de nom pour notre compagnie de coupe jarrets ! Faut un truc qui claque, qui fasse peur aux gens mais facile à retenir, qu'ils ne se trompent pas !
Onirym : je croyais qu’on en avait déjà un nom ? On est pas la compagnie du furet ?
La Fouine le regarde droit dans les yeux : dans la vie il y a des trucs qui changent p’tit … Alors comme proposition j’ai d’un côté, la compagnie de la fouine … Ça manque cruellement d’originalité, même si c’est fait pour me faire plaisir … mais non ! Sinon on a les claironneurs … Je ne vois pas le rapport … et la proposition de Betz : les chiens galeux. Ça manque de prestige à mon avis … Alors mon p’tit Onirym, toi qu’es si malin t’aurai pas une idée à soumettre à nous pauvres petits voleurs, traines savates, pouilleux à grelots ???
Onirym : faut pas se dévaloriser de la sorte les gars ! Une idée … voyons une idée … Un truc simple qui en impose et qui fasse un peu peur quand même … Pourquoi pas les Loups de Sang ? On est une meute, on mord, parfois même le bras qui nous nourrit … Ce serait une bonne allégorie ?
La Fouine : je connais pas cette drolière mais oui l’idée est pas mal …

Le lendemain à l’aube, Onirym a récupéré toutes ses affaires et pris la poudre d’escampette, laissant la Fouine et Archibald à leur crise d’autorité, marchant vers d’autres cieux et aventures …