Livre 3 / Voyage(s)

Yggdrasil

Yggdrasil

Assise sur une grosse branche, dans la cime de l’arbre gigantesque, Pépette regarde droit devant elle, le regard perdu dans le vide …

Son esprit voyage, parcourt le monde, fuyant sa douleur.

Dans sa poitrine son petit coeur bat fort et chaque battement est comme un déchirement, lui rappelant qu’elle est bien vivante, alors que tant de ses amis sont morts.

Une fois de plus, elle se laisse déborder par la tristesse et le désespoir. De grosses larmes brillantes coulent sur ces petites joues roses et délicates. Elle éclate en sanglots et pousse un hurlement déchirant.

Autour d’elle les branches de l’arbre s'agitent et un bruissement de feuilles, innombrables, accompagne son cri de désespoir. Le vent emporte au loin ses pleurs, dans une nuée de feuilles d’automne …

Un petit écureuil roux arrive en sautillant et vient se lover contre elle. Pépette le prend dans ses bras et le serre très fort contre son coeur meurtri.

Ecureuil : ça va mieux maintenant ?

Pépette : merci Aurel, je ne sais pas ce que je ferai sans toi …

Aurel : mourir de tristesse peut être ?

Pépette : sûrement.

Aurel : c’est moche. Il faut te reprendre ma chère !

Pépette : j'essaie mais je n’y arrive pas …

Aurel : c’est pour ça que je suis là.

Pépette : je ne peux pas surmonter ma peine et ma douleur, tant de choses horribles sont arrivées, tant de mort et de souffrance, et pourquoi ? Un bout de pouvoir, une vile vengeance … Que de choses futiles !

Aurel : tu te poses trop de questions.

Pépette : comment fais tu pour garder le moral ?

Aurel : j’ai un secret : je m’occupe l’esprit ! Je planque des noisettes dans tous les recoins de cet arbre et j’essaie de me souvenir où je les ai caché ! Après je fais la tournée des popotes pour vérifier qu’elles sont bien là.

Pépette : merci mais j’ai pas très envie de cacher des noisettes.

Aurel : c’est un truc d'écureuil c’est pour ça. Faut que tu trouves un truc de fée, ca marchera mieux pour toi ! Ça fait quoi les fées pour s’occuper ?

Pépette : ca fait des trucs nuls et futiles, ca joue avec ses amis … Ses amis …

Les larmes recommencent à couler.

Aurel : ok j’ai fais une boulette, j’aurai pas dû parler de ça ! Et si on jouait à cache cache ? Ou réveiller les hiboux ? J’adore leur air bougon quand on les sort du sommeil avant la tombée de la nuit ! Ou chercher des formes rigoles dans les nuages ? C’est bien ça non ?

Pépette : tu penses qu’un jour j’arriverai à dépasser mon chagrin ? A revivre normalement ?

Aurel : tu le dois ! Déjà parce que tu seras vachement plus rigolote que maintenant, ensuite n’oublies pas qu’il y a encore des gens qui comptent sur toi ! Onirym en tête. Et enfin en mémoire de tes amis …

Aurel ne finit pas sa phrase. Il commence à faire des cabrioles sur les branches autour de Pépette.

Aurel : si tu n’arrives pas à m’attraper avant le coucher du soleil j’aurai le droit de te traiter de grosse chaussette puante pendant une semaine !

Aurel s’élance, sautant de branche en branche.

Pépette se lève, déploie ses ailes et vole à sa poursuite.

Pépette : et moi si je t’attrape je pourrais t'appeler mon gros choupinou d’amour et te faire porter une jolie couronne de fleurs !

Autour d’eux, de jeunes pousses éclosent sur les branches de l’arbre et une nuée de pétales de fleurs emporte leurs rires au vent …

Chanson d’enfer

Chanson d’enfer

Juché sur un gros rocher, Gontrand le ménestrel fait face à une horde de démons.

Gontrand se met à chanter : Et la grosse rombière balance son jolie derrière, Ninon balance ces nichons sous le regard amusé du grand prince démon

Un gigantesque démon rouge, assis sur un trône installé au sommet d’une montagne de crânes se met à rugir : non ça ne va pas du tout !!! Je n’ai pas un regard amusé ! Je suis cruel, je fais peur, je suis terrible !!! Et tu n’as pas parlé de mes majestueuses cornes, je t'avais dit que je voulais que tu parles de mes cornes dans ta chanson !

Gontrand : oui j’allais y venir, mais vous m’avez coupé avant !

Le gigantesque démon rouge : insolent ! Ne me parles pas de la sorte ou je te fais arracher la langue ! Je te rappelle que tu es encore “vivant” et en un seul morceau uniquement selon mon bon vouloir ! Tu es censé me divertir avec tes chansons, c’est ton tourment, alors si tu n’y arrives pas, tu vas finir dans une cage avec les autres !

Gontrand : je comprend maitre, je vais faire des efforts … C’est que c’est pas facile de trouver l’inspiration avec tous ces démons qui sont là à me regarder, prêts à me dévorer … Et j’ai l’habitude de chanter en musique c’est plus facile …

Le gros démons se tourne vers la horde à ses pieds : Ok les gars, fabriquez moi quelques tambourins avec de la peau d’elfe et une lyre avec des boyaux de donzelle, ça fera l’affaire pour notre exigeant ménestrel !

Gontrand : non NON ! Ce n’est pas la peine d'écharper des gens ! Je vais me passer d’instruments … Je peux chanter sans, c’est bien aussi … Tiens j’ai de l’inspiration, écoutez celle-là, elle devrait vous plaire !

La horde démoniaque pousse des cris d’encouragements.

Gros démon rouge : allez-y, mais elle a intérêt à être bonne …

Gontrand se met à hurler : sous le ciel rouge des enfers, le grand roi attend !

Ses cornes rouges et majestueuses sont le symbole de sa puissance, 

Tous les démons le craignent et le vénère, même ma maman !

Et pan et pan sur ton derrière, devant le grand seigneur démon il faut que tu prosternes …

Gontrand se frappe les cuisses en rythme, gesticule et fait des mimiques grotesques pour amuser son auditoire démoniaque …

Il pense : oh la vache, ca va pas être simple de rester en seul morceau par ici …

Epée

Un peu plus loin, assis à l’entrée d’une grotte obscure, Uriel observe la scène avec une certaine délectation.

A ses côtés, Brindille finit de ronger un os.

Brindille : vous avez l’air content maître ?

Uriel : oui je regarde ce Gontrand essayer de se débattre pour préserver sa vie, c’est plaisant. Je ne pensais pas qu’il tiendrait aussi longtemps. C’est vrai que ce gros balourd de Vassago est facile à flatter, mais il se lasse vite … Il s’en tire pas mal le petit humain. On verra bien s’il est encore là demain …

Uriel se lève et fait quelques pas dans la plaine désertique et rougeoyante des enfers.

Brindille : vous partez maître ?

Uriel : oui et vous venez avec moi ma chère. Il y a un truc que je dois vérifier … À propos d’Onirym … Je ne ressens plus sa présence, c’est étrange … Et au passage, comme on sera pas très loin, vous pourrez aller tourmenter encore une fois les songes de cette chère Pépette ! C’est tellement rafraîchissant !

Brindille : oh merci maître !

Brindille se lève à son tour et tire violemment sur une longue chaîne de fer. Une forme recroquevillée, à l’autre bout de la chaîne, pousse un cri de douleur.

Brindille : et lui ? On en fait quoi ?

Uriel : laisse le ici, on repassera le prendre plus tard …

Brindille : attendez mon maître ! Je prends quelques provisions pour le voyage, je n’aime pas voyager le ventre vide.

Brindille tire sur la chaîne, traînant à elle le pauvre malheureux enchaîné à son extrémité. L’homme est entravé au cou par un lourd anneau hérissé de pics qui s’enfoncent dans ses chairs. Sa peau est couverte de plaies et de souillures.

Brindille l’attrape par les cheveux et plonge ses crocs dans son avant bras.

L’homme grimace de douleur mais n’a plus la force de résister. Ni même de crier …

Brindille se redresse, un long filet carmin coulant à la commissure des lèvres. 

Brindille : Haaaa du sang d’ancien vampire maudit, un grand cru !

Uriel : le fait qu’il était un dieu avant doit aussi améliorer le goût !

Brindille : sûrement … Mais ce que j’aime le plus c’est ce petit arrière goût de remords et de culpabilité …

Uriel : vous devenez une vraie gastronome ma chère !

Au travers de la forêt des brumes

Au travers de la forêt des brumes

Onirym se réveille doucement.

Il est porté par le doux mouvement du carrosse, le grincement des essieux et le “clip clop” des sabots des chevaux sur le chemin.

Il ouvre doucement les yeux. Onirym est assis sur un banc tapissé de velours rouge. Au travers des fenêtres de l'équipage, il aperçoit une forêt. Des arbres décharnés, tordus, les branches nues comme des griffes essayant de déchirer le ciel. Au-dessus de la cime des arbres, la voûte céleste nocturne est baignée d’étoiles brillante et la lune, majestueuse, inonde le paysage fantasmagorique d’une lueur claire et laiteuse.

Histoire d’ajouter encore un peu plus de mystère à cette scène irréelle, un épais brouillard enveloppe la forêt, transformant l'ombre des arbres en spectres torturés.

Une voix douce et féminine sort Onirym de sa torpeur : Alors ? Bien dormi ?

Assise face à lui dans le carrosse, une jeune femme aux longs cheveux noirs, vêtue d’un épais manteau de soie le regarde en souriant.

Elle tient blotti sur ses cuisses un gros chat noir qui le fixe également.

La scène a quelque chose d’irréel, de troublant.

Onirym n'a aucune idée d'où il est et de comment il est arrivé là …

Onirym : heu … Bonjour. Qui êtes-vous ? Où sommes-nous ?

Le jeune femme sourit légèrement, et c’est le chat qui répond : Si vous êtes ici c’est que vous êtes mal barré !

Onirym : pardon ?

Chat : quoi ? Vous n’avez jamais vu de chat qui parle ?

Onirym : si, mais ça c'est plutôt mal passé (1).  

Chat : rassurez vous je n’ai rien à voir avec mes congénères qui peuplent votre monde. Voyez moi plutôt comme un messager.

Onirym : où sommes-nous ?

Chat : ce n’est pas important. Ce qui compte c’est la destination de notre voyage …

Onirym : si vous le dites.

Chat : et il vaudrait mieux pour vous ne pas y arriver …

Onirym : génial !

Onirym cherche dans ses poches le barzougalpahium. Il commence à paniquer quand il se rend compte que ses poches sont vides ! La sphère magique a disparu !

Chat : vous cherchez quelque chose ?

Onirym : oui j’ai perdu un truc important !

Chat : c’est peut être que cet objet n’était pas si important que cela au fond …

Onirym : vous rigolez ? C’est le seul moyen que je connaisse pour rentrer chez moi !

Chat : et c’est vraiment ce que vous voulez ?

Onirym : mais bien sûr ! Je veux revoir mes amis, ma douce Sinara et …

Chat : et ?

Onirym : et je vais être papa ! Je ne peux pas les abandonner.

Chat : N'est-ce pas pourtant ce que vous faites ?

Onirym : oui … non ! Je n’ai rien voulu de tout cela !

Chat : vous le pensez vraiment ?

Onirym : Oh hé ça suffit avec vos questions à deux balles ! Bien sûr que je veux rentrer !

Le chat fait un grand sourire énigmatique et révèle une large rangée de dents hérissées.. Ses yeux se mettent à luire autant que la lune au-dessus d’eux.

Un sentiment de crainte et de malaise s'empare d’Onirym.

Il essaye de changer de sujet de conversation en s’adressant à la jeune femme : et vous ? Que pensez-vous de la situation ? Vous avez vu ma sphère magique ? Comment faire pour rentrer chez moi ? Qui êtes-vous ? Vous trouvez pas que votre greffier est un peu étrange ?

Le jeune femme tourne délicatement la tête vers Onirym, plongeant ses grands yeux dans le regard perdu d’Onirym. Onirym se rend alors compte que la jeune femme a exactement les mêmes yeux que son chat !

La scène commence à se brouiller, la brume envahit l'intérieur du carrosse et Onirym se sent partir.

La voix lointaine du chat parvient à ses oreilles avant que l'obscurité n'envahisse tout : on dirait que vous avez déjà trouvé un élément de réponse, c’est pas mal, vous n’êtes peut être pas aussi désespéré que vous en avez l’air !

(1) Voir les chapitres du Livre 1 : Le jour de la lune et la dernière fête de chat-pin.

Un monde en ruines

Un monde en ruines

Onirym se réveille. Il est envahit par le froid.

Il ouvre les yeux, tous les sens en alerte !

Il est aux portes d’une antique cité en ruine, balayée par des vents glacés. Le ciel est aussi étrange que lors de son périple dans cet étrange carrosse. Une clarté spectrale baigne les lieux, rendant l'endroit vraiment flippant.

Le chat noir vient se frotter contre ses jambes et bondit sur un muret en ruine.

Chat : et bien vous voilà face à votre destin. Je vais vous laisser là parce qu’ils arrivent. Et j’ai pas envie de mourir. Bonne chance !

Avant qu’Onirym ait eu le temps de réagir, le chat bondit dans les ruines et disparaît.

Onirym serre les dents et pense très fort : c’est vraiment du grand n’importe quoi cette aventure ! Je me demande quel Dieu fantasque s’amuse ainsi à me torturer ! J’en ai marre !!!

Mais il n’a pas le temps de se plaindre plus longtemps, car il entend du bruit sur sa droite !

D’un geste vif il se tourne dans cette direction, sort son poignard en acier valyrien et se met en garde.

Une silhouette apparaît en courant, saute par-dessus un muret et se dirige droit vers Onirym !

Il se met en garde, prêt à accueillir son adversaire correctement, mais ce dernier passe près de lui en continuant de courir, il lui lance juste au passage : l’ami je serai vous je resterai pas ici !

D’autres bruits s'élèvent au coeur de la cité en ruine et des ombres approchent dans leur direction.

Ni une ni deux, Onirym fait demi-tour et suit l’inconnu.

Ils courent tous les deux dans les ruines. Autour d’eux les ombres se rapprochent, elles sont rapides et fugaces, de vrais ninjas !

Alors qu’ils arrivent au pied d’une imposante tour en ruine, les deux compères sont entourés par les ombres. Il y a au moins une dizaine de personnes qui ont toutes l’apparence d’un bon assassin psychopathe !

Onirym : je crois qu’on est cuit !

Inconnu : en effet, je pensais qu’en les ramenant sur vous, ça ferait diversion, mais ça n' a pas marché.

Onirym : sympa !

inconnu : n’y vois rien de personnel l’ami je cherche juste à sauver ma peau ! On fait affaire ? On se protège les arrières l’un l’autre pour le moment ?

Onirym : ok mais je ne sais pas si cela va suffir, ils ont l’air menaçants …

Les ninjas assassins ont refermé leur nasse autour des deux fuyards. Positionnés à des endroits stratégiques, ils coupent toute retraite.

Sans un mot, ils sortent leurs lames et s’avancent, doucement, en direction d’Onirym et de son étrange compagnon de fortune.

Onirym : flute, si seulement j’avais le barzougalpahium …

Inconnu : hein ? Quoi ?

En se mettant en position de combat, face aux ninjas assassins, Onirym sent un objet lourd taper contre sa jambe. Il plonge la main dans sa poche et ses doigts se referment sur la lourde sphère de métal !

Onirym : mais elle est là !

Il sort rapidement l’objet de la poche, active les runes, et une vive lumière envahit les ruines.

Onirym est sauvé !


Barre

Il reprend son souffle, et découvre l’endroit où il a atterri. Une sorte de forêt, tout à fait normale. Pas de danger aux environs, c’est déjà ça !

Inconnu : oh la vache, par les couilles de ma grand-mère c’est dingue ce truc !

Onirym remarque l’inconnu à ses côtés qui reprend son souffle également, suite au transfert.

Onirym : vous êtes là ?

Inconnu : oui et je vous remercie pas d’avoir essayé de m’abandonner derrière vous. On va dire que ça fait un partout … On est quitte !

Onirym : oui enfin disons que je ne savais pas que je pouvais emmener des gens avec moi pendant les transferts. Je débute dans l’utilisation de ce truc !

Inconnu : c’est pas grave. On est sauvé c’est le principal !

Sorell

Sorell

Une heure après, nos deux compères sont assis au pied d’un gros arbre, devant un bon feu de camp, en train de faire cuire un pauvre lièvre qui a eu le malheur de croiser leur route.

Les ventres gargouilles, attisés par la bonne odeur de la viande qui commence à griller.

En attendant de pouvoir dévorer leur dîner, Onirym engage la conversation …

Onirym : en fait je m’appelle Onirym, et toi qui es tu ? Qu’est ce que tu faisais dans ces ruines sinistres ?

Inconnu : salut je m’appelle Sorell. J’étais là bas pour chercher fortune. Ces ruines regorgent de richesses, j’en suis sûr.

Onirym : et pourquoi ces assassins en avaient après toi ?

Sorell : j’en sais trop rien, dès qu’ils m’ont aperçu dans les ruines, ils m’ont pris en chasse. Je pense qu’ils cherchaient quelque chose également.

Onirym : et comment tu es arrivé dans les ruines ?

Sorell : ce fut compliqué. J’ai volé un plan à un mage qui a passé sa vie à étudier ces ruines. C’est pour ça que je me suis dit qu’il y avait un max de richesses à récupérer ! Mais parlons aussi de toi ! Qu’est ce que tu fichais là ?

Onirym : moi c’est un peu plus compliqué. Je suis arrivé dans ces ruines, sans savoir exactement comment …

Ça vient de cette sphère magique que j’ai utilisé pour nous téléporter. Elle est assez capricieuse et je gère pas très bien, voir par pas du tout, le lieu d'atterrissage. Je te préviens tout de suite, essaie même pas de me la piquer ! Tu ne saurais pas la faire fonctionner de toute façon et je t’ai à l’oeil !

Sorell : t’inquiète l’ami, je détrousse pas les gens qui me sauvent la vie ! J’ai des principes et de l’honneur !

Onirym : permet moi de ne pas te croire sur parole …

Sorell : c’est quand même la marmotte qui se moque de l’ours cette histoire ! C’est moi qui ne devrait pas te faire confiance ! Ton histoire est toute alambiquée et je devrais te croire sur parole ?

Onirym : c’est moi que tu traites de marmotte ?

Sorell : c’est une expression de chez moi !

Onirym et Sorell interrompent leur discussion pour dévorer leur repas et prendre un repos bien mérité.

Onirym ne dort que d’un oeil, sa dague bien serré dans une main et l’autre agrippant la sphère au fond de sa poche …

Mais la nuit se passe sans encombre. A son réveil, Sorell a relancé le feu et fait griller des champignons.

Sorell : allé la marmotte on se réveille ! T’as faim ?

 

Après un frugal petit déjeuner et une toilette rapide dans l’eau glacée d’une petite rivière, les deux compagnons d’infortune reprennent la route. N’ayant aucune idée de l’endroit où ils se trouvent ils décident donc d’avancer vers l’ouest, en suivant le soleil.

Au bout de plusieurs heures de marche, ils arrivent sur un petit chemin creux qui traverse la forêt. C’est plutôt un bon présage, ça veut dire qu’il y a de la civilisation quelque part !

Sorell est un compagnon agréable, toujours à chanter, rigoler ou lancer une petite blague !

Onirym reste tout de même méfiant …

Alors que la nuit commence à tomber, le petit chemin sort de la forêt et croise une route plus importante.

Un panneau de bois indique une direction avec marqué dessus “Middenheim”.

Sorell s’exclame : hé mais je connais cette ville ! Par contre on est vachement loin de chez moi, va falloir presser le mammouth par les couilles si je veux rentrer à la maison …

Onirym : t’as quand même des expressions surprenantes !

Sorell : j’en sais rien, je ne me rends pas compte. Allé vient ! S’il y a un panneau indicateur c’est qu’on doit pas être très loin d’un village !

 

En effet, à quelques lieues de là, au fond d’un petit vallon, la route mène vers un village.

La nuit tombe et le froid se fait sentir.

Sorell hâte le pas. Viens il faut qu’on soit à l'abri, la nuit il y a des trucs étranges qui rodent …

Ils arrivent aux portes du village. Une palissade de bois entoure les maisons aux toits de chaume.

Deux tours protègent une lourde porte bardée de fer qui permet de rentrer dans le village.

Sorell frappe à la lourde porte : salut les gars, laissez nous entrer ! On a des pièces d’or à dépenser à la taverne.

Rien ne se passe.

Sorell refrappe à la porte : ho hé ! Je sais que vous êtes là ! Ne faites pas comme si vous ne nous aviez pas entendus ! Allez quoi ! Laissez nous entrer ! Il fait froid, il fait nuit et j’ai soif !

Rien ne se passe.

Sorell frappe des pieds et des poings sur la lourde porte : vous allez vous réveiller oui ? Et nous laisser entrer !

Une grosse voix finit par répondre : passez votre chemin étrangers !

Sorell : non mais vous rigolez des genoux ? 

Garde : on ne doit pas ouvrir les portes du village, une fois la nuit tombée. Ordre du capitaine.

Sorell : mais il ne fait pas encore complètement nuit !

Garde : trop tard, passez votre chemin et revenez demain, si vous êtes encore en vie …

Sorell : allez les gars soyez sympa ! Et je vous paye une tournée à la taverne !

Garde : pas besoin, on a déjà toute la bibine dont on a besoin ici … Et puis la porte c'est chiant à ouvrir, faut retirer la poutre, qui bloque les battants, elle pèse une tonne, non franchement, j’ai la flemme, désolé les gars !

Onirym : la vache, on dirait les gardes du palais …

Sorell : et si je vous donne le mot de passe ?

Garde : quel mot de passe ?

Sorell : celui qui dit que je suis un personnage important et que vous devez absolument nous laisser rentrer !

Garde : alors là ça me ferait bien chier mais en effet je serai obligé d’ouvrir … J’aurai pas trop le choix …

Sorell : Ouvre bien grand tes pavillons car je vais te le donner moi ce mot de passe !

Garde : oui mais ça ne servirait à rien …

Sorell : et pourquoi ? tu viens de dire que tu seras obligé d’ouvrir la porte !

Garde : oui mais moi je ne sais pas quel est le mot de passe, il n’y a que le capitaine qui le connaisse …

Sorell : et bien va le chercher alors !

Garde : ça va être compliqué …

Sorell : quoi encore ?

Garde : il s'est embrouillé avec Nina, sa régulière cet après midi, alors là vu l’heure il doit être en train de tenter de se réconcilier, et donc si je viens le déranger je vais me prendre un coup de pied au cul, c’est sur !

Sorell : par Ulric et par Sigmar mais c’est pas possible d’être aussi con ! Et si j’étais un envoyé du grand Comte de Middenheim, vous croyez que votre capitaine serait content de savoir que vous m’avez fait poireauter à la porte comme çà ! Je suis sûr qu’il vous fouettera les fesses avec une râpe à fromage pour vous apprendre à suivre les ordres !

Garde : oui mais non …

Sorell : quoi non ?

Garde : vous n'êtes pas un messager du comte.

Sorell : et comment vous pouvez en être sûr vous n'avez pas ouvert la porte pour nous voir !

Garde : parce que je suis peut être un peu abruti mais pas con ! Si vous aviez été un personnage important, vous auriez commencé par ça au lieu de brailler pour aller boire un coup à l’auberge !

Sorell :ha oui c’est vrai que c’est pas con en effet …

Onirym chuchote à Sorell  : mais tu connais vraiment un mot de passe qui nous permettrait d’entrer ?

Sorell : oui ça se pourrait bien … J’ai chourré quelques notes à des chevaliers templiers une fois, dans une auberge et il y avait plusieurs mots de passe indiqués … Ça vaut le coup d’essayer.

Onirym : ok alors laisse moi tenter un truc.

Onirym : garde vous êtes toujours là ?

Un rot tonitruant se fait entendre comme réponse.

Onirym : je suis Onirym, seigneurs des terres d’Onirym, du royaume d’Arrendyll en pays d’Elvenar, et …

Garde : c’est pas très original ca.

Onirym :de quoi ?

Garde : bin le coup d’Onirym seigneur des terres d’Onirym … Ça fait un peu répétition …

Onirym : oui mais c’est parce que ce sont mes terres, donc elles portent mon nom …

Garde : ça se tient.

Onirym : donc maintenant que vous avez la preuve que nous sommes des personnages importants, vous pouvez aller chercher votre capitaine pour que mon ami puisse lui donner le mot de passe et nous permettre d’entrer ?

Onirym attend quelques instants mais le garde ne répond rien.

Onirym : vous m’avez entendu ?

Garde : oui.

Onirym : alors pourquoi vous ne faites rien ?

Garde : j’ai l’impression que j’ai affaire à des voyageurs lourds et sans scrupules. Vous allez pas me lâcher ?

Onirym : En effet !

Garde : donc impossible de roupiller tranquillement si vous êtes là tout le temps à brailler derrière la porte ?

Sorell : parfaitement !

Garde : ok vous avez gagné, je vais chercher le capitaine …

Un petit village perdu du Drakwald

Un petit village perdu du Drakwald

Au bout d’un moment, Onirym et Sorell entendent du bruit derrière la porte.

Garde : et donc il y a deux gars qui veulent rentrer … Ils disent qu’ils sont nobles ou un truc du genre, j’ai pas très bien compris, et qu’ils connaissent le mot de passe …

Grosse voix : j’espère que c’est pas des conneries et que tu ne m’as pas dérangé pour rien !

Sorell : on vous entend !

Grosse voix : bon je suis le capitaine Bert, qu’est ce que vous voulez ?

Sorell : on veut entrer !

Bert : pour ça il me faut le mot de passe ! Je vous préviens si vous êtes une bande de cul terreux, je dis à Max de monter dans la tour et de vous arroser de quelques carreaux d’arbalète !

Sorell : aucun souci ! Voici le mot de passe : les chaussettes de Sigmar sentent la rosé du matin.

Bert : merde, ils connaissent vraiment le mot de passe … Max ouvre leur la porte, moi je retourne voir Nina, elle est chaude comme la braise !

Garde : et vous voulez pas m’aider à ouvrir la porte ? Super sympa …

Bert : débrouille toi !

Frise

Une heure plus tard Onirym et Sorell sont confortablement installés dans l’auberge du village, autour d’un bon bol de bouillon bien chaud !

Onirym : ahhhh un peu de calme et de sérénité, dans un endroit ou aprioris personne ne me veut du mal, c’est bien …

Sorell : pourquoi ? D’habitude les gens te tapent dessus ? Tu sais, si cela t’arrive souvent, il faut te poser les bonnes questions … C’est peut être pas que de leur faute !

Onirym : oui mais non … C’est compliqué …

Sorell : tu veux en parler ? Attends, je commande deux bières !

Sorell fait signe à la jeune et jolie serveuse qui apporte prestement deux chopes remplies à l’écume amère et odorante …

Sorell fait un large sourire. Onirym ne sait pas très bien si c’est pour les bières ou la serveuse …

Tout en savourant le délicieux nectare, Onirym promène son regard sur l’auberge.

Derrière un comptoir rustique constitué de tonneaux, le vieil aubergiste nettoie ses chopes avec un torchon qui n’a pas vu l’eau claire de la rivière depuis des siècles !

Une large cheminée crépite, réchauffe et éclaire l’auberge, d’une vive lumière agréable.

Différentes tables et bancs sont installés un peu au hasard dans la large salle au sol de terre battue recouvert de sciure et de joncs.

Une vingtaine de personnes sont attablées, par petits groupes. Ça boit de la bière ou du cidre, ça joue au dés, aux osselets ou aux cartes, ça discute doucement en savourant un plat en sauce servi sur une large tranche de pain …

L’ambiance est paisible mais pourtant … Onirym a une sorte de préssentiment, une impression étrange … Que quelque chose cloche …

Il observe la scène, les gens avec plus d’insistance …

Et là ! il voit ! Onirym remarque certains détails troublants … Un des homme attablé près de la cheminée à un tentacule à la place du bras gauche ! Un autre un peu plus loin à des pieds fourchus et poilus. Un troisième, dans un coin, cache derrière une tignasse imposante un troisième oeil au milieu du front. Et la jolie et ravissante serveuse, à des oreilles assez étranges … Plus proche de celles d’un lapin que d’un humain !

Onirym écarquille les yeux, ouvre grand la bouche de surprise.

Sorell pose une main ferme sur son bras et lui murmure : calme toi. Ne montre pas que tu as remarqué, sinon tu vas finir comme çà.

Sorell montre discrètement les gars qui jouent aux osselets.

Onirym : je vais finir comme eux ?

Sorell : non tu vas finir comme les osselets !

Onirym : mais c’est quoi ce bazard ?

Sorell : se sont des mutants. La région a subi depuis des millénaires de grandes incursions du Chaos. Ça laisse des traces … Ces gens ne sont pas maléfiques, ce sont juste des victimes …

Onirym : et c’est normal par ici ?

Sorell : c’est plutôt tabou, et très mal vu dans l’Empire … Tout le monde n’a pas mon ouverture d’esprit. Les mutants sont persécutés, chassés, tués, dès qu’ils sont découverts. Je n’ai jamais entendu parler de village ou de lieux ou les mutants pouvaient vivre en paix. Il doit y en avoir beaucoup par ici, peut être même tout le monde …

Onirym : le Chaos ?

Sorell : tu viens d'où toi ! Oui le Chaos, et ses hordes de créatures démoniaques et corrompues, les bêtes du chaos sanguinaire, les skavens, les disciples impies …  Une force ancestrale, un pouvoir primordial qui corrompt et détruit tout ce qu’il touche … T’as jamais entendu parler de Khorne, Tzeentch, Nurgle ou Slaanesh ?

Onirym : honnêtement ? Non ?

Sorell : ce sont les Dieux du Chaos. Leur pouvoir de destruction et de corruption est immense …

Onirym : bon et bien c’est décidé, cet endroit n'est pas aussi sympathique qu’il en avait l’air …

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